Les Saints de Solesmes par Pascal Stritt

L’abbaye Saint-Pierre de Solesmes, qui surplombe majestueusement les rives de la Sarthe, accueille aujourd’hui une communauté de moines bénédictins.
Érigée à la fin du XIXe siècle en pierre de tuffeau, l’abbaye abrite en son sein deux grands ensembles témoins majeurs de l’art de la sculpture de la fin du XVe et du début du XVIe siècles : la mise au tombeau du Christ et la Belle Chapelle, toute entière consacrée à la Vierge Marie.

Les moines ont conçu avec l’agence « Les Pistoleros » ( Dijon) un projet de beau livre pour mettre en valeur ces joyaux et rappeler l’histoire de l’abbaye. Six auteurs ont contribué à cet ouvrage : trois spécialistes de la sculpture du XVe et du XVIe siècles, de l’art médiéval et de l’ornement sculpté à la Renaissance ; deux moines de la communauté pour l’histoire de l’abbaye et la lecture théologique et spirituelle des deux ensembles ; et Pascal Stritt, bien connu de nos lecteurs, pour les photographies.

Écoutons-le : « Un beau jour d’octobre 2017, je pars à Solesmes en repérage, pour évaluer l’importance du travail photographique, mais aussi pour “faire connaissance” avec les Saints de Solesmes, appréhender le lieu et son ambiance lumineuse pour donner une direction au projet : format de prises de vues, noir et blanc ou couleur, éclairage ou lumière naturelle… J’avais déjà une petite idée de l’œuvre grâce à des documents que j’avais pu consulter, mais, au pied de ces gigantesques mises en scène de pierre, ce fût une grande émotion. Dans le transept sud, je suis frappé par la beauté, la sobriété et le calme qui se dégagent de la Mise au tombeau du Christ. Dans le transept nord, à l’inverse, l’œil ne sait plus où se reposer… Jusqu’au sommet de la voûte, la Belle Chapelle est un foisonnement de personnages, d’animaux et d’ornements…
Je reviens à l’abbaye au printemps 2018. Les ensembles sculptés s’élèvent jusqu’à 12 m du sol pour ceux de la Belle Chapelle. J’utilise une nacelle télescopique que les moines mettent à ma disposition. Ils s’en servent habituellement pour le dépoussiérage des sculptures en hauteur. Frère Jean-Philippe, le moine “bricoleur” de l’abbaye, m’a initié pendant une matinée au maniement de l’engin et j’ai obtenu brillamment mon “permis nacelle” grâce auquel j’ai pu me poster au plus près des sculptures habituellement inaccessibles, tout en guettant les apparitions d’une lumière essentielle à mes prises de vues.
Car j’ai décidé de travailler en lumière naturelle pour respecter à la fois l’ambiance du lieu et aussi le travail des sculpteurs. Mais la lumière est capricieuse, surtout en novembre, les journées sont courtes et parfois elle est carrément absente !.
Quel bonheur de pouvoir ainsi approcher ces personnages, de les avoir à portée de regard avant d’effectuer des clichés, alors que je les voyais à peine depuis le sol ! C’est ce regard que je vais pouvoir faire partager grâce à ce livre. »